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Hervé Nader, homme politique, résistant déporté et entrepreneur quimpérois (1899-1985)

Hervé Nader fait partie de ces quimpérois qui ont inscrit leur action dans la mémoire de leurs contemporains.

L'hôtel de Cornouaille à ConcarneauVoir l'image en grand L'hôtel de Cornouaille à ConcarneauTour à tour, propriétaire exploitant d'un grand hôtel, négociant en vin, armateur et créateur d'une compagnie de desserte maritime avec l'Afrique du Nord, Hervé Nader ne se contenta pas d'une vie consacrée à ses entreprises. Ce chrétien fervent s'engagea dans la vie politique locale et nationale. Ses idéaux et ses valeurs le conduisirent à rejoindre les rangs de la Résistance.

Le service des archives municipales conserve un grand nombre de documents d'archives d'Hervé Nader devenu propriété municipale lors de la session des anciens chais Nader du Corniguel à la ville. Ces documents aujourd'hui inventoriés et conservés dans un dépôt d'archives publiques permettent d'approcher l'histoire de cette haute personnalité.

Hervé Nader naît à Quimper, rue des Réguaires, le 17 septembre 1899. Son père, Isidore Nader est natif de Clohars-Fouesnant et propriétaire d'une épicerie en gros à Quimper. Sa mère, Marie-Louise Philomène Le Roux est commerçante et originaire d'Ergué-Gabéric. Hervé Nader étudie au Likes à partir de 1905. Il poursuivra ses études jusqu'au baccalauréat.

Pendant la Première Guerre mondiale, Hervé Nader devance son appel sous les drapeaux et s'engage comme volontaire le 24 décembre 1917 pour servir dans la marine.

A l'issue du conflit il se lance dans l'entreprise familiale puis en 1924 devient copropriétaire-exploitant du Grand hôtel de Cornouaille à Concarneau, établissement balnéaire réputé, fondé avant la déflagration de 1914. Il développe l'établissement largement ruiné par la guerre et en fait une station de grand standing fréquentée par une clientèle aisée et souvent internationale.

Prospectus de hotel de cornouaille dans les années 1950Voir l'image en grand Prospectus de hotel de cornouaille dans les années 1950Hervé Nader devient également dès les années 1930 vice-président de la Chambre nationale de l'Industrie hôtelière et de la Chambre d'industrie touristique de Concarneau et président d'honneur du syndicat départemental de l'industrie hôtelière.

La première puis la seconde guerre ruineront à chaque fois l'établissement qui a chaque fois se relèvera de ses ruines.

Le grand hôtel de Cornouaille est transformé en 1940 en hôpital temporaire pour l'armée française puis est réquisitionné après juin 1940 par l'armée allemande pour toute la durée de l'occupation.

De l'action politique à la Résistance

Salle à manger de l'hôtel de CornouailleVoir l'image en grand Salle à manger de l'hôtel de CornouailleHervé Nader se lance dans la vie politique mouvementée des années 30. Il devient député de Quimper lors des élections législatives de mai 1936 sous l'étiquette de candidat républicain d'union nationale.

En janvier 1941, il est élu maire de Concarneau. Il le restera jusqu'à sa déportation. Différentes notes qu'il a laissé permettent de suivre son parcours dans la France Libre.

En juin 1940, Hervé Nader parvient à se rendre en Espagne, à Saint Sébastien, grâce à un passeport délivré par l'ambassadeur de France à Madrid. Il vient alors se mettre comme résistant breton à la disposition du général de Gaulle à qui il fait parvenir une lettre par le consulat britannique.

Le 10 juillet 1940, il figure parmi les 12 députés qui s'abstiennent de voter les pleins pouvoirs au maréchal Pétain (par ailleurs 357 députés votèrent pour, 57 contre). Ayant regagné la Bretagne, il y attend d'être contacté par un agent britannique. Hervé Nader se consacre alors à ses activés de résistance au sein du réseau Johnny et notamment aux liaisons maritimes avec l'Angleterre.

Salon de l'hôtel de CornouailleVoir l'image en grand Salon de l'hôtel de CornouailleEntre mars et mai 1941, c'est le seul réseau français à avoir communiqué directement avec Londres par radio. Les Allemands en traquent sans répit les membres. Si 196 agents ont été recensés, 53 d'entres eux sont morts et 60 ont été déportés ou internés.

Hervé Nader est lui aussi arrêté par la Gestapo le 17 février 1942 et envoyé à la prison d'Angers où il est emprisonné pendant 15 jours. Il est ensuite incarcéré à Fresnes où il reste une année, jour pour jour.

Il quitte alors Fresnes pour être détenu à Compiègne pendant un mois et demi. De là, il est déporté politique près de Linz en Autriche au terrible camp de concentration de Mathausen où il lutte pour sa survie et celle de ses camarades pendant deux longues années.

La survie dans l'univers concentrationnaire est marquée de périodes de travail dans des chantiers extérieurs au camp pendant lesquelles les déportés sont soumis à de mauvais traitements. Hervé Nader a laissé pour la postérité un terrible récit abrégé de sa vie dans les commandos de travail du camp de Schwecat en Autriche.

Le camp de Mathausen est libéré par les troupes américaines le 5 mai 1945. La conduite exemplaire d'Hervé Nader lui vaudra de nombreux témoignages d'admiration de nombre de ses camarades de déportation.

Témoignage activités Nader pendant son internementVoir l'image en grand Témoignage activités Nader pendant son internementMais lorsque Hervé Nader est libéré, sa santé comme celle de nombre de ses camarades semble irrémédiablement atteinte. Malgré cela, dès le mois de juin 1945, Hervé Nader de retour à Concarneau, met son hôtel à la disposition du comité départemental des anciens déportés pour servir de maison de repos aux anciens déportés.

Parallèlement, il s'investit dans la vie politique de la Libération mais aussi dans les associations d'anciens résistants et déportés. Il est nommé délégué à l'Assemblée Consultative provisoire en 1945. Il parvient à relancer dans les années qui suivent les travaux nécessaires à la réouverture du Grand Hôtel de Cornouaille et à lui redonner tout le lustre et le faste de l'avant guerre.

Hervé Nader au Corniguel

Hervé Nader ne se contente pas de cette première activité.

Le Saint-Joseph à quai au CorniguelVoir l'image en grand Le Saint-Joseph à quai au CorniguelConfronté aux problèmes de ravitaillement de l'après guerre et aux difficultés d'importation de vins, il crée en 1950 les Chais du Corniguel, principal entrepôt d'importation du vin du Finistère après celui de Brest. L'entrepôt est situé au nouveau port de Quimper, au Corniguel sur l'ancienne commune de Penhars où l'on vient de transférer tout le trafic maritime quimpérois.

Cette entreprise emploie à son apogée près de 60 salariés. Comme il faut passer par un chargeur maritime pour transporter ce vin, Nader devient également le fondateur d'un armement maritime appelé « Compagnie Celte de Gérance d'Armement ».

Il achète et arme des cargos pinardiers. Les cargos importent depuis les principaux ports d'Afrique du Nord, essentiellement d'Algérie, des vins de consommation courante et exportent vers l'Afrique du Nord des produits bretons (production des conserveries, légumes, pommes de terre).

L'un des plus important navires de l'armement est le Saint Joseph, unité de 342 tonneaux, ancien pétrolier reconverti en pinardier.

Nader est également cosignataire de navires d'autres armements français qui viennent fréquenter le port de Quimper. Devant la réussite de son armement une ligne régulière de navigation entre Quimper et l'Afrique du Nord se met alors en place.

Dans les années 1950 Hervé Nader devient président de la conférence maritime Franco-Algérienne. La décolonisation et l'indépendance de l'Algérie vont mettre progressivement un terme à cette activité à partir de 1962. Ainsi disparaît le dernier armement important de Quimper.

Hervé Nader occupa dans ces années une place importante dans la vie politique finistérienne. Il est réélu député de Quimper en 1958, inscrit au groupe UNR face au sénateur MRP André Monteil. Il siège jusqu'en 1962. C'est l'un des acteurs de la création du Grand Quimper en 1960.

Le Saint-Joseph dans la tempêteVoir l'image en grand Le Saint-Joseph dans la tempêteIl est nommé officier dans l'ordre de la Légion d'Honneur, croix de guerre 1939-1945, médaillé de la Résistance, croix du combattant volontaire 1914-1918 et 1939-1945 et reçoit les médailles de la Déportation et de la France libre.

Il décède à Quimper le 28 avril 1985.



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