Depuis bientôt vingt ans, le théâtre de Cornouaille agit en faveur des personnes pour lesquelles l’accès aux spectacles est compliqué. Pour des raisons sociales, géographiques ou liées aux handicaps. À Quimper, l’élargissement des publics, c’est du concret, du quotidien. Et cela fonctionne.
À l’expression « publics empêchés », l’équipe du théâtre de Cornouaille préfère celle de « publics éloignés », vers lesquels elle chemine pour les rapprocher de propositions artistiques diverses. Parce que le théâtre est un lieu de vie, d’ouverture, de démocratisation culturelle, qui participe à la cohésion sociale.
Les personnes en situation de handicap bénéficient de nombreuses actions de médiation, ainsi que de « parcours de spectateurs ». Par exemple, depuis 2005 une visite des salles, plateaux et coulisses est possible ; il existe une maquette tactile du lieu. Le bâtiment est accessible aux personnes à mobilité réduite.
Aux personnes sourdes ou malentendantes, le théâtre propose des spectacles, parfois un doublage en langue des signes. Pour les personnes aveugles ou malvoyantes, en plus des spectacles musicaux, une pièce est présentée en audiodescription. Plusieurs dizaines d’adhérents des Auxiliaires des aveugles et de l’Institut pour l’insertion des déficients visuels (IPIDV) sont ainsi attendus en avril prochain pour Cyrano de Bergerac. Nouveauté depuis 2012 : la grande salle est équipée d’une boucle magnétique, qui amplifie le son pour les porteurs de prothèse auditive.
Lutter contre les discriminations, c’est aussi faire venir des populations qui n’ont pas l’habitude de fréquenter les lieux culturels. Le festival Circonova, avec des places à 1 €, a été une réussite d’intégration : de nombreuses familles ont découvert le théâtre de Cornouaille… et s’y sont senties à leur aise. Le Contrat urbain de cohésion sociale (CUCS) soutient des projets menés avec le collège Max-Jacob – la chanteuse Annie Ebrel y intervient cette saison. Des spectacles sont joués en lien avec la MPT de Penhars.
Les zones rurales ne sont pas oubliées : le théâtre se déplace dans les zones « blanches », à Carhaix, Audierne, Saint-Evarzec ; à Penmarc’h, élèves de primaire et personnes âgées d’un foyer ont écouté un quatuor de l’Orchestre symphonique de Bretagne, une belle histoire.
De nombreuses structures liées au handicap mental sont partenaires du théâtre (Pas à pas, instituts médico-éducatifs…). Depuis cette année, une dizaine de personnes en souffrance psychique de l’hôpital Gourmelen se rendent au théâtre. Elles font partie, au sein de l’association Silène, d’une troupe de comédiens qui réunit soignants et soignés.
« Visiter les coulisses, assister à des répétitions, c’est être au coeur de la cité, comme les autres citoyens, et sortir de la maladie, explique Jean-Baptiste Davot, infirmier et coanimateur de la Compagnie de l’incongru. On a vu trois représentations cette année. Chacun était impatient, a eu du plaisir à dire son ressenti et cela enrichit notre mise en scène. »
Se pose par ailleurs la question du coût des spectacles. Afin qu’il ne soit pas un obstacle, la ville de Quimper finance un dispositif géré par l’ALVAC. Sur critères sociaux, avec une carte annuelle (telle celle des comités d’entreprise) à 3,05 €, on bénéficie de tarifs très réduits. Pour un abonnement à cinq spectacles, le coût à l’unité peut être de 2,50 € : ne pas hésiter à se renseigner, en particulier lors des permanences du vendredi.
Josiane Joncour préside la délégation finistérienne des Auxiliaires des aveugles (82 adhérents dont 40 déficients visuels et 42 bénévoles et sympathisants). Le théâtre de Cornouaille, elle connaît !
« J’accompagne des personnes qui y sont tout de suite reconnues et chaleureusement accueillies. Un itinéraire spécifique nous permet d’arriver juste devant la scène, les premiers rangs nous sont réservés. En 2013, Le Misanthrope fut une belle soirée : les gestes des acteurs, les décors étaient commentés en direct par un technicien qui avait assisté à une séance la veille. On apprécie le CD de présentation de la saison, on reconnaît les voix de David, d’Aurélia qui sont nos interlocuteurs. Même le directeur y lit son édito ! » Quant à Elisabeth Woloszyn, elle a découvert les lieux avec Datcha, son chien guide. « Je me réjouis à l’idée de pouvoir y venir seule, grâce au service HandiQUB. Les spectacles en audiodescription, certains de musique, m’intéressent en particulier. »
Plus d’information : Les Auxiliaires des aveugles : 02 98 55 13 26. Courriel : auxiliaires.aveugles29@laposte.net
Théâtre de Cornouaille/Scène nationale, tél. 02 98 55 98 55, www.theatre-cornouaille.fr
Les Auxiliaires des aveugles, tél. 02 98 55 13 26, www.lesauxiliairesdesaveugles.asso.fr
ALVAC, Tél. 02 98 53 01 87, www.cezam-bretagne.com/alvac_29s
Silène, Tél. 02 98 53 62 63, www.assosilene.fr